Angela Merkel a beau avoir gagné son pari, l’élection fédérale de 2009 restera celle où les Allemands ont envoyé promener une classe politique qu’ils jugent déconnectée de leur réalité.
Le taux de participation de 71%, le plus bas depuis 1949, dénote bien la fracture entre l’offre et la demande en terme de politiques. Les abstentionnistes ont fait perdre à la CDU/CSU 680000 voix et au SPD 1390000 (ici). Dans le même tableau, on constate que la CDU/CSU perd des voix au profit de tous sauf le SPD et que les sociaux-démocrates voient leur appuis partir partout.
Dit simplement, le centre allemand s’effondre au profit des camps idéologiques. La droite (voire le centre-droit) s’est tournée vers le FDP, la gauche Die Linke. Les Pirates n’ont pas trop affectés Die Grünen, qui ont su profiter allègrement de la débâcle du SPD.
Ce graphique démontre bien que l’appui des électeurs envers les deux grands partis s’effrite avec les années et que le contraire se produit avec les petits partis. Il ne s’agit donc pas uniquement d’un mouvement passager survenu à la suite de 4 années d’une Grande Coalition où tant le SPD que la CDU/CSU se sont compromis suffisamment auprès de leurs clientèles traditionnelles pour que celles-ci les punissent.
Guido Westerwelle et Oskar Lafontaine sont les deux grands gagnants de ce soir. Et si la tendance se maintient, peut-être que la fin du règne CDU/CSU/SPD sur la politique allemande s’achèvera plus vite que l’on voudra bien le croire.
Selon moi, le plus gros problème en Allemagne va devenir un problème d’unité nationale suite à la polarization politique.
Soit dit, Die Linke prouve bien qu’il existe pas mal de gens qui ont l’Ostalgie ou ne sont simplement pas à l’aise avec le système capitaliste ou les changements qu’ont subis à l’ex-RDA depuis 1989 quitte à voter pour des gens ayant un passé carrément noir qui sont carrément des politiciens recyclés du SED dans un nouvel emballage. Bien entendu, Die Linke a la même clientèle que le NPD allemand et de voir la descente d’un parti pourrait voir la montée de l’autre.
Pour le SDP, il va y avoir un gros dilemme face à son avenir et je crois que ce parti pourrait subir un NPDrisation (dans le sens politique Canadien du terme) en étant dans les 20-25% du vote sans être capable d’aller chercher des électeurs à gauche ou à droite plus que le noyau dur du parti. N’oublions pas qu’en 10 ans, le parti a perdu tranquillement près de la moitié de ses appuis!
Cependant, il est vrai que la droite économique (ou même libertarienne) en Allemagne est fort probablement la grosse gagnante. Autant dire, que le FDP n’est pas seulement aller chercher des votes au CDU/CSU, mais aussi au SDP ou peut-être même ailleurs.
L’anti-nazisme est trop fort pour que le NPD en vienne à nuire à Die Linke, alors là-dessus j’ai confiance – même si je ne suis pas d’accord pour élire des communistes semi-repentis. Les manifs anti-nazis sont pleines de gens de Linke!
Le problème du SPD, c’est de parvenir à convaincre les gens qu’il est encore à gauche. Ceux qui ne le croient plus vont vers Die Linke (ça te rappelles pas le PQ vs QS?). Le SPD se trouve donc dans les mêmes limbes que la CDU, qui continue de se réclamer parti du centre et du monde ordinaire. Et, entre toi et moi, si on ne peut plus faire la différence entre les deux bien c’est Angela qui gagne car on aime la personne Angela Merkel.
Le FDP a récupéré les mécontents du virage à gauche de la CDU mais il s’est aussi ouvert à la classe moyenne et, plus généralement, à ceux qui en ont marre de 1984. Mais à lire leur programme, on se rend vite compte que ce n’est pas un parti libertarien. On est loin de Glenn Beck!