Il est de bon ton de blâmer l’extrémisme politique sur le dos de la misère humaine. L’arrivée des Nazis au pouvoir en 1933 est, plus souvent qu’autrement, expliquée par la détresse économique de l’Allemagne après 1929. Il en va de même pour la « popularité » des « Bruns » en ex-RDA: la population y serait désaxée suite à l’effondrement du régime communiste. Personnellement, je ne crois pas que ça puisse tout expliquer et, à mon avis, c’est une explication très partisane.
J’ai eu la chance d’en discuter un jour, avec des gens qui m’ont bien expliqué que le SED fermait les yeux sur la mouvance nationaliste, ce qui fait que les Allemands de l’Est n’ont jamais eu la même honte d’être Allemand que leurs cousins de l’Ouest. Et, même si le sujet demeure méconnu, le cinéma l’a immortalisé dans deux films: Führer Ex est surement le plus connu mais, fait inusité, la censure est-allemande a laissé passer, dans Coming Out sorti à l’automne 1989, une scène où la Volkspolizei ferme les yeux sur des skinheads attaquant un bar gay de Berlin-Est.
Dans la foulée du scandale des Dönermorder, Die Welt publie un texte tout à fait captivant intitulé « Braunes Erbe der DDR« , où Freya Klier explique bien les liens entre le nazisme, le régime du SED et l’impact sur les Ossis d’aujourd’hui.
Les 40 ans d’histoire de la RDA sont marquées par un antisémitisme et une xénophobie très bien entretenus par le régime.
Pour combler les manques de main d’oeuvre suite à l’émigration massive d’avant le Mur, la RDA fit venir des contingents de Vietnamiens et de Mozambicains (qui furent presque tous expulsés à la Réunification). Ces travailleurs, qui ne pouvaient rester plus de 3 ans, étaient soumis à un régime de vie inacceptable. On les forçait à vivre dans des résidences séparées, n’avaient pas le droit d’entrer dans les cafés et restaurants, devaient demander la permission pour se déplacer hors de leur ville de résidence. Au travail, ils étaient confinés aux tâches « inférieures ».
On leur interdisait aussi d’apprendre l’allemand. Et, gardons le pire pour la fin, les autorités est-allemandes avortaient de force toute « travailleuse immigrée » enceinte. Gageons que les néonazis n’auraient rien à redire à propos d’une telle politique issue pourtant de leurs ennemis…
L’auteure avait été menacée de mort pour avoir publié cette histoire en septembre 1990. Elle relate aussi qu’en 1935, un Nazi avait violé une de ses amies juives et qu’elle l’avait retrouvée, plus tard, secrétaire du SED.
En 1986, le régime a voulu détruire le cimetière juif du quartier Weißensee à Berlin. Un an plus tard, des hordes de jeunes attaquaient des juifs réunis dans une église à grands cris « Juden raus aus deutschen Kirchen » et « Sieg Heil ». En 1990, Freya Klier a été prise à partie dans un S-Bahn en raison de ses cheveux foncés. En 1993, des résidents du quartier berlinois de Köpenick se sont opposés à l’installation de réfugiés bosniaques, qu’ils appelaient des porcs, dans leur voisinage.
Vingt ans plus tard, la dame constate que si les Ossis gardent leurs opinions pour eux-mêmes, ils n’ont pas changé pour autant. Des élèves de Neuruppin (Brandenburg) lui ont déjà juré qu’ils sont « submergés par les étrangers » alors qu’aucune personne dans l’école est née hors de l’Allemagne!
Die Linke doit cesser d’être hypocrite et reconnaitre qu’il a très bien préparé le terrain. Et l’Est doit faire le même travail d’introspection qu’a fait l’Ouest, surtout après 1968.
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