La manchette est rêvée: la gauche danoise remporte les élections et Helle Thorning-Schmidt, une femme de 44 ans, devient la nouvelle locataire de Amalienborg.
J’aimerais qu’on m’explique d’où vient cette excitation. Jeudi dernier, les Danois sont passé au rouge après dix ans de bleu, une alternance logique, un comportement électoral rien de plus typique. Il est tout aussi intéressant de noter que, en pratique, les bleus de Lars Løkke Rasmussen et les rouges de Helle Thorning-Schmidt sont deux grands partis mainstreams qui se ressemblent autant que nos libéraux et nos péquistes. Au cours de la campagne, les deux chefs ont été aussi tout autant moqués par les humoristes.
Vendredi, l’article d’AP repris sur Radio-Canada.ca parlait d’un virage à gauche après 10 ans de réformes favorables aux marchés. C’est oublier la libéralisation du marché du travail entreprise par les sociaux-démocrates de Poul Nyrup Rasmussen lors de leur dernier passage au gouvernement.
Personne ne pleurera la neutralisation des ultra-nationalistes du Dansk Folkeparti, par contre c’est être malhonnête de ne pas voir les liens entre le programme « social et national » qui veut sauver l’État-providence danois en expulsant les étrangers et les idées défendues par l’extrême-gauche de Endhedslisten ou SF.
À l’autre bout de ce rødblok qui inclut, selon mon ami Thomas, « au moins la moitié du spectre politique », on trouve des sociaux-démocrates modernes et pragmatiques
qui oublieront bien vite cette campagne où ils ont déchiré leurs chemises contre les privatisations et la baisse des impôts s’il se trouve que c’est la seule manière
de ne pas léguer un Danemark en faillite à la prochaine génération. Surtout que Margrete Vestager et Det Radikale Venstre, les doux sociaux-libéraux, ont appuyé toutes les mesures du dernier gouvernement concernant les réformes du système social.
D’entrée de jeu, Enhedslisten a d’ailleurs refusé toute alliance avec Det Radikale Venstre, trop à droite à ses yeux. Un geste qui n’étonne personne et qui soulage des millions de Danois, frileux à l’idée d’avoir des communistes révolutionnaires au gouvernement. Imaginez, des candidats du parti ont affirmé vouloir exproprier des entreprises telles que A.P Moller Maerk et Lego!
J’aimerais souligner la « maturité » des commentateurs danois, qui n’ont pas attribué à son sexe les critiques envers Helle Thorning-Schmidt. Je pense également qu’elle a su bien gérer ces critiques, dont plusieurs visaient les comportements financiers de son mari, contradictoires avec son programme électoral.
La survie de ce gouvernement ne semble pas assurée, on parle déjà d’un nouveau vote dans un an. Les rouges ne formeront pas un bloc aussi solide que les bleus, Venstre et Det Konservative Folkeparti semblaient être plus en mesure de s’entendre avec DF que les SD avec leurs partenaires. D’ailleurs, l’opposition s’active déjà à désunir les vainqueurs avant même la formation du gouvernement…ça promet!
Ce qui démontre les défauts du système politique danois. On vante souvent la proportionnelle comme la solution aux gouvernements minoritaires, or c’est qu’a le Danemark depuis novembre 2001.
Par contre, une fois de plus, les Danois ont démontré qu’ils s’intéressent à l’administration de leur pays. 87% de participation, c’est extrêmement élevé, et je vous
rappelle que les élections danoises ont lieu la semaine, un jour travaillé. Les idéalistes diront que c’est à cause de la proportionnelle, je dirais plutôt que c’est parce que les Danois donnent beaucoup d’argent à cet État, ils veulent donc avoir leur mot à dire sur ce que fait Christiansborg de leurs lourds impôts.
Parlant de cela, soulignons la performance des libéraux d’Anders Samuelsen. Liberal Alliance a fait campagne sur le thème de la liberté et d’impôts ne dépassant pas 40%, faisant élire 9 députés.
DR Valg
La coalition n’étant encore qu’à l’étape des négociations, c’est une histoire à suivre!
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