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La France, trop à gauche pour les Allemands

À 3 jours du second tour de la présidentielle française, la chaîne ARD a demandé aux Allemands, dans le cadre de son sondage mensuel « DeutschlandTREND », qui souhaitent-ils voir à l’Élysée.

50% des Allemands souhaitent la réélection de Nicolas Sarkozy. Sans trop de surprise, les électeurs conservateurs CDU/CSU choisissent Sarko à 76% mais même la gauche allemande lui accorderait sa confiance: 55% des Pirates, 43% des Verts et 42% des sociaux-démocrates – seuls les supporters du Linke voteraient pour le candidat socialiste François Hollande, à 66%.

Parallèlement, le sondage de la chaine publique s’est intéressé à l’opinion des Allemands sur le Pacte Fiscal Européen, l’ensemble des mesures d’austérité budgétaire chèrement défendues par Angela Merkel. Là encore, il semble faire l’unanimité: 55% des Allemands choisissent l’austérité à des mesures de croissances financée par l’endettement public.

Là encore, Linke fait cavalier seul. Ses supporters sont les seuls à supporter majoritairement, à 68%, un accroissement de la dette publique pour raviver l’économie de la Zone Euro. Du côté des autres partis, s’ils sont encore 39% des électeurs du SPD à choisir l’option keynésienne, moins de 30% des votants de la CDU, des Verts et des Pirates sont d’accord.

De quoi bien confirmer l’illibéralisme de la France!

Berliner Morgenpost

Hôpital: 250 km

Je l’avoue, je me suis toujours bien marré de ces histoires concernant les grands espaces canadiens. L’explication serait probablement que je ne suis jamais sorti des zones habitées. Parallèlement, je suis tout aussi désintéressé quand on me parle sur comment les Européens vivent collés. Très vite, je rappelle à mes interlocuteurs que 1000 km séparent Paris de la Côte d’Azur, qu’il faut des heures pour traverser l’Allemagne et qu’au départ de Copenhague, on roule 500 km avant d’atteindre la pointe nord du Danemark.

En 2007, j’ai pris le train de Paris vers Montluçon pour assister au mariage de mes amis dans le département de l’Allier…. 3 heures dans le bois! À me descente, je me suis exclamé « Veux-tu bien me dire pourquoi les Français viennent au Québec pour aller dans le bois? »

C’est en Islande que la notion de « territoire vide » s’est vraiment ancrée dans moi. 320000 personnes vivent sur 103000 km2 et une fois qu’on enlève le sud-ouest du pays, Akureyri et l’archipel de Vestmannaeyjar, il reste moins 100000 personnes sur un territoire immense. Rouler 2-300 km et ne rencontrer qu’une dizaine de véhicules, voir des fermes où le plus proche voisin est à des dizaines de kilomètres, voilà.

La fermière de Moðrudalur nous expliquait que le voisin est à 37 km, l’épicerie 60 et la ville 104. Helga, notre guide, disait que pour vivre dans ces coins reculés de l’est du pays, il faut avoir un congélateur bien rempli et être prêt à tout, y compris éteindre l’incendie de sa maison. La scolarité des gens est basse, les jeunes n’ayant pas toujours les moyens de continuer leurs études s’ils doivent habiter en ville… Au primaire, les enfants doivent tellement parcourir de kilomètres en autobus qu’ils ont des horaires de cours spéciaux.

Tout ça pour en venir à un sujet d’actualité de ce mardi: les salles d’accouchement en Islande rurale. Dans 7 régions du pays, les mamans doivent parcourir plus de 75 km pour donner naissance à leur enfant, la palme revient aux résidentes de Þórshöfn á Langanesi – 250 km pour se rendre à l’hôpital d’Akureyri. Un trajet long mais aussi impensable par mauvais temps, et en Islande c’est plus la norme qu’autre chose (exemple).

Pourquoi on en parle? C’est que l’Islande a besoin d’argent et les services de santé en région rurale sont dans la ligne de mire. Or, c’est un roue qui tourne, par prévoyance, les femmes se rendent en ville au lieu d’avoir à parcourir de si grandes distances. Donc, les salles d’accouchement des dispensaires des plus petites communautés en viennent à ne plus être utilisées: on ne recense aucune naissance à Egilsstaðir depuis 2002, à Húsavík depuis 2007 et à Patreksfjorður depuis 2004. Et même dans les plus grandes, compte tenu de la baisse de la fécondité, on observe une baisse des accouchements.

Le dilemme est donc prévisible. D’un point de vue comptable, logique de fermer des installations qui ne sont pas utilisées. Mais la population locale y tient tout de même, le service devant exister pour des situations d’urgence telle une naissance prématurée.

J’avoue ne pas être 100% certain que la situation ne se produit pas au Canada mais la prochaine fois qu’on m’en parler, je saurai quoi répliquer… 😀

Après la France, à l’Allemagne de s’en prendre à Ryanair

Le très rigide droit du travail français avait poussé Ryanair à se retirer du pays d’ici 2 semaines, on apprend maintenant que l’écolo-catastrophisme allemand aura raison d’une bonne partie des activités du transporteur dans le pays (ARD).

Ce sont des mauvaises nouvelles non seulement pour les employés et les clients de l’entreprise, mais également le milieu touristique allemand. Ça va faire très mal à Berlin, qui en 2010 atteindra 20 millions de nuits d’hôtels pour la première fois. Schönfeld est un gros hub pour les low-costs, qui permettent aux gens de toute l’Europe de venir passer la fin de semaine pour pas cher dans la plus belle ville du monde.

Ryanair diminue ses activités en Allemagne en raison de nouvelles taxes sur le transport aérien, taxes instaurées parce que le transport aérien « endommage le climat » comme on dit dans les médias germanophones.

Il semble donc que le lobby vert va réussir l’impensable tour de force: faire arrêter les Allemands de voyager. Car, de sondage en sondage, la notion de « voyager local » prend de plus en plus d’ampleur dans l’opinion.

J’ai beau me réjouir de constater que les Allemands semblent avoir retrouvé leur esprit critique face au discours écologistes, il n’en demeure pas moins que, médiatiquement parlant, ça demeure une priorité absolue.

Tenez, ici par exemple, Der Spiegel nous parle d’une étude réalisée sur les « émissions de CO2 des aliments » faite par les organisations de consommateurs. « Manger saisonnier et régional, c’est protéger le climat » dit le monsieur, qui d’ailleurs demande que l’étiquetage obligatoire des produits (140 tonnes par jour) importés en Allemagne par avion. Encore chanceux qu’il ne demande carrément pas une interdiction…

Il s’agit pour moi d’un excellent exemple de « retour en arrière »: à l’heure où la planète est au bout de nos dix doigts, il faudrait se nourrir de produits provenant le plus près de chez nous, et donc très peu diversifiés, pour ne pas lui nuire.

Cet autre texte m’apparait tout aussi choquant: Ici, on souligne la baisse des émissions de CO2 des individus en raison de la consommation de choses moins polluantes mais on critique…la hausse des exportations allemandes qui fait monter les émissions du pays. Allô, on ne mettra pas l’économie allemande à terre pour plaire à la planète? Ont-ils une idée de combien d’emplois ça coûtera? Surprenant de la part de gens qui ne cessent de se plaindre du chômage élevé en Allemagne.

Le deuxième article montre aussi une certaine radicalisation du vocabulaire utilisé dans les médias allemands. Sans surprise, « réchauffement » (Erderwärmerung) a fait place à « changement » (Klimawandel). On ensuite inventé « protection du climat » (Klimaschutz), utilisé partout tout le temps. Et c’est là que ça se corse…

Qui dit protection, dit protecteur. Donc, Klimaschutzer. Et il y a nécessairement des « non-protecteurs », ie des Klimaschänder. D’où l’adjectif utilisé par Der Spiegel: « Klimaschädliche ».

Savez-vous ce qu’est un Kinderschänder? Un abuseur d’enfants.

Je pense que rendu là, c’est un bon signe qu’on va trop loin.

La France et l’Allemagne: la Cigale et la Fourmi?

Le Sénat français a, sans surprise, adopté la réforme sur l’âge de la retraite qui passe officiellement de 60 à 62 ans. Quelle savoureuse ironie de lire sur cette décision dans la presse scandinave, région où travailleurs et patrons sont prêts à tout pour conserver la viabilité de leur système (et non pas leurs acquis, ce n’est pas la même chose!). Par exemple, à 65 ans, l’Islandais ne prend que sa pré-retraite alors que le Français est à la maison depuis 5 ans.

En Allemagne, malgré l’opposition à l’intérieur du SPD, la coalition CDU-SPD a augmenté progressivement l’âge de la retraite à 67 ans, de façon à assurer la pérennité du système de pension mis en place par Otto von Bischmark à l’époque de l’unification du pays. Il y a bien eu des manifestations mais aucunement de l’ampleur de celles connues en France, d’ailleurs en Allemagne la loi interdit les « grèves politiques »: on ne peut sortir en grève que par rapport à sa convention collective.

Les jeunes et les chômeurs allemands ont les même plaintes que les Français: pourquoi travailler plus, il y a même pas de travail. Sauf qu’il est mal avisé de blâmer le chômage sur la lenteur des départs à la retraite, la France et l’Allemagne étant toutes deux royalement inflexibles au niveau de l’emploi, ce qui bien évidemment rend les entreprises plus frileuses dans le domaine des ressources humaines.

Force est de constater également que ça s’inscrit dans une perspective plus large. Dernièrement, il a été annoncé qu’Eurostar commandait des trains Siemens, ce qui a fait rager la classe politique et les médias français. Une colère qui en cache une autre, dixit les observateurs de l’UE.

Car pour voir si Siemens pourrait avoir le contrat, il a fallu amener un ICE de Deutsche Bahn dans le tunnel sous la Manche. Le succès du test a immanquablement eu des échos dans la grande tour DB sur Potsdamer Platz: et si Deutsche Bahn reliait l’Allemagne à Londres directement, sans que les voyageurs aient à transiter par Bruxelles ou Paris?

On recule la loupe encore un peu. Malgré les directives européennes, la France s’obtine à garder ses monopoles d’État. Paris ne manque jamais d’excuses pour expliquer qu’EDF, la SNCF, la Poste soient encore sous son aile. Rappelez-vous la crise des suicides à France Telecom, que les travailleurs ont mis sur le dos de la privatisation de l’entreprise?

À la même époque, l’Allemagne a écouté Bruxelles et s’est désengagée. Deutsche Telekom et Deutsche Post sont entrées en bourse, l’électricité a été complètement privatisée et dérèglementée. Il ne reste que Deutsche Bahn a capitaliser, mais celle-ci a vu son monopole remis en question sur plusieurs lignes, notamment locales. DB a commencé à investir à l’étranger, sa division bâtiment opère des gares britanniques.

Deutsche Telekom est présente un peu partout en Europe, même aux États-Unis avec son service T-Mobile. La Post, déjà soumise à la concurrence en Allemagne, attend impatiemment d’avoir le droit d’ouvrir des bureaux un peu partout dans l’UE. Et vous connaissez tous sa division messagerie DHL!

D’un côté, on voit que les sociétés publiques françaises ont peur d’affronter la concurrence. Peur que ne partagent pas les sociétés allemandes, probablement parce qu’elles étaient gérées davantage comme des entreprises que des ministères.

On peut même ajouter le taux de change. L’Allemagne favorise un Euro fort avec son titre d’exportateur numéro deux au monde, la France préfère une monnaie européenne faible et accuse l’Allemagne de lui nuire en rendant ses produits moins compétitifs.

La tendance est donc facile à observer: tandis que la France s’accroche à son passé des Trente Glorieuses, l’Allemagne ne cherche pas à se défiler devant les défis du 21ième siècle et cherche à trouver des solutions pour conserver sa prospérité.

Pour les Allemands comme les Scandinaves, la fin justifie les moyens: si on veut rester riches, il faut s’arranger pour le rester. Pas se battre pour ne pas changer quand tout change autour de nous.

Spiegel

Retraite: la France contre la Norvège

À l’heure où les syndicats français se mobilisent pour une autre journée de grève, un sondage sur la question est sorti en Norvège. Malheureusement pour les amis de Louise Beaudoin, seulement 25% des Norvégiens de 60 ans rêvent à la retraite.

En 2006, le même sondage avait révélé que seulement 56% des gens de 60 ans désiraient continuer à travailler.

Même en ayant droit à la retraite, 54% des Norvégiens continuent à travailler, une hausse de près de 20% en six ans.

C’est la différence fondamentale entre les Scandinaves et leurs « imitateurs »: les premiers sont prêts à payer le prix d’un tel système, les autres espèrent faire payer tout le monde sauf eux!

NRK

La « Voix de la France »

En 2002-2003, j’avais écrit, sur un forum français, que le projet de France 24 me rappelait l’ORTF des années 1960 où la télévision et la radio étaient « le gouvernement dans la salle à manger des Français » (cit Alain Peyrefitte). Dommage que le site ait été fermé, j’aimais tellement ce texte! Mais enfin, je me rappelle des grandes lignes…

Il n’y a bien sur aucune raison objective qui empêche l’existence d’une chaine internationale d’information en français ou multilingue basée en France. Là où ça dérape, cependant, c’est quand on affirme que sa raison d’être sera « donner une perspective française sur le monde ». Car moi, et surement que je ne suis pas le seul, j’en déduis automatiquement qu’on mettra en ondes l’agenda du Quai d’Orsay. L’analyse journalistique n’a aucune couleur nationale, c’est une questions d’idées et impossible qu’une personne soit la SEULE à penser comme « ça » sur un sujet donné. J’ajouterai ensuite qu’il faut être passablement aveuglé par le nationalisme pour faire l’amalgame entre les pensées d’un individu et sa nation.

On a dit que Jacques Chirac avait relancé le projet avec la Guerre d’Irak, où aucun discours n’a opposé celui des médias « anglo-saxons » pro-guerre. Difficile de le croire quand on regarde l’étendue de l’opposition à l’invasion du pays.

Pourquoi je parle de cela aujourd’hui? D’abord cet article de Cyberpresse sur l’ajout d’heures au service arabe de France 24.

Bien sûr, en bon gaulliste, le directeur y va du mantra habituel.

Il a assuré que France 24 présentait «une perspective française, différente de ses concurrents anglo-saxons», et notamment une «diversité d’opinions en opposition aux Américains qui ont une vision unifiée du monde».

L’histoire prouve bien qu’en France, la télévision sert le pouvoir. Même 30, 40 ans après la fin de la tutelle directe du Ministère de l’Information, même après la privatisation de TF1… Parlez à Arlette Chabot, Patrick Poivre d’Arvor, Claude Sérillon… des gens tassés de l’antenne parce qu’ils ne plaisaient plus au gouvernement. Comparons ça à l’Angleterre, où il est controversé que le directeur de la BBC rencontre David Cameron car c’est un « threat to independence and impartiality », on est sur une autre planète!

Alors la « perspective française », lâchez-nous: c’est bien la politique française dont on parle. À part cela, c’est le discours de gauche habituel si présent à la télévision, publique comme privée, en Europe. Et justement, quand la NRK ou ARD font de tels reportages, jamais ces gens ne parleraient de perspectives norvégienne ou allemande.

Quant à son deuxième point, le premier l’explique évidemment. Quand Alain de Pouzilhac regarde CNN International, il entend le Département d’État. S’il avait la chance de regarder les trois, CNN, MSNBC et Fox News, il verrait évidemment que la vision du monde varie selon l’alignement éditorial du médias, ce qui n’est pas du tout le cas à la télévision française!

Ce qui m’amène à cet après-midi, où j’ai brièvement regardé une édition spéciale du magazine Kiosque sur TV5. J’ai cessé de regardé l’émission régulièrement après avoir constaté que Christian Rioux, du Devoir, était toujours laissé pour compte « parce que le Canada, c’est petit ». Pourquoi l’inviter si on ne lui laisse que 10 secondes pour parler de la « vision canadienne ».

Bien sûr, la « vision canadienne » intéressait peu de monde de toute façon: qui aime parler de Stephen Harper chez ses bons socialistes? Car Philippe Dessait s’en fout que le Tageszeitung soit plus à gauche que le Financial Times Deutschland, l’important c’est la « vision allemande ». À se demander pourquoi TV5 n’invite pas des diplomates à la place. Vivement Dateline London sur BBC World, au moins les journalistes parlent en leur nom!

Parlant du Tageszeitung, Dorothea Hahn, correspondante à Washington, participait à Kiosque en tant qu’ancienne du panel. Au cours de la conversation, où elle comparait son travail à Paris avec celui aux États-Unis, elle s’est retrouvée à dire que si les Américains s’intégraient plus au monde, s’ils voyaient plus des autres pays, il n’y aurait pas de gens comme le « Tea Party qui sont contre des choses comme la justice sociale ».

Évidemment, le gars de Fox News à côté d’elle n’était pas d’accord mais il n’a pas parlé, seulement ri d’elle.

Car ce qui se cache derrière ses propos, c’est faux. Cette prémisse comme quoi les sociétés sont monolithiques, homogènes, consensuelles, c’est de la foutaise. Oui, certaines lignes de pensées sont plus mainstream que d’autres, plus répandues dans les médias, mais pourquoi faire comme si les autres n’existaient pas? Si Dorothea Hahn prenait la peine de lire des blogues affiliées au FDP, par exemple, elle trouverait une toute autre Allemagne que celle que son journal présente!

Les Français veulent-ils travailler?

C’est une question qui fait mal mais je ne peux m’empêcher de la poser après avoir vu les reportages de France 2 sur l’opposition à la réforme des retraites de ce soir.

Dans 80 lycées, les étudiants sont sortis manifester contre la réforme. Selon l’une d’entre eux, « c’est important parce que ça sera dur quand on sera vieux si on ne fait rien ».

Il est non seulement très ironique de voir des jeunes de 16 ans, qui n’ont jamais travaillé, protester contre la retraite à 62 ans, mais aussi s’opposer à une réforme qui vise à diminuer le fardeau des retraités sur les jeunes travailleurs.

De plus, quand j’entends ces employés de la SNCF se plaindre que c’est dur, travailler à horaire variable, se lever à 3:00 du matin, etc… Que conduire un autobus à 60 ans, c’est l’enfer… Ça me dépasse. Dans certains cas, c’est mémère alors que, dans d’autres, ça fait partie de la job! On ne devient pas infirmière ou pompier si on veut travailler seulement du lundi au vendredi de 9 à 5!

Je pense également à ces Français de mon âge, qui se plaignent, non sans raison, de la précarité qui les guette. Quand on n’a aucun emploi stable avant 30 ans, comment peut-on sérieusement envisager une retraite à 60 ans?

Mon père est entré chez Alcan à 18 ans. Il est normal qu’il est sorte à 58-60. Mais moi, dont les trois emplois donnent à peine un peu plus de cinq chiffres annuellement (ne vous inquiétez pas, un jour je sortirai de ce trou, d’ici là j’ai réalisé deux de mes rêves en 2010: voir l’Islande et avoir une voiture), je ne peux même pas rêver à la retraite avant 75 ans. Comme je discutais avec un ami danois, « ajoute 40 ans à l’âge où tu as ta première vraie job, là voilà ton âge de retraite ».

De toute façon, on va tous vivre 90 ans quand même. Et, au lieu de faire comme nos parents et d’attendre la retraite pour tout faire, on va y aller à mesure.

Les analystes analphabètes

Hier soir, LCS voulait me parler sur MSN mais j’étais occupé à pondre ma traduction française du programme des Sverigedemokraterna. Ce soir, quand il l’a lu, il a sursauté: Comment un parti aussi interventionniste pouvait-il être qualifié d’extrême-droite? S’il l’est en Suède, disait-il, c’est sûrement que les autres partis le sont encore plus.

S’en est suivi plus d’une heure de débat que je n’aurais jamais cru à avoir avec quelqu’un dont l’argument préféré est souvent « Mais rappelle-toi tes cours de science po ».

En bon apparatchik, il ne voit que de la stratégie, du populisme en politique. Aucune analyse intellectuelle des idées. Le classement gauche-droite, selon lui, ça a tout à voir avec le baromètre de la société et ça varie partout.

Je ne peux qu’être partiellement d’accord avec cette affirmation. Évidemment, ce qu’on appelle « la droite » en France n’a pas la même signification qu’aux États-Unis. Mais je trouve que c’est manquer à son devoir d’analyse que d’y aller avec « Oh wow la Suède est vraiment à gauche si l’extrême-droite propose des garderies d’État gratuites ».

Bien sûr que le contexte local joue dans l’offre des partis politiques. Mais analyser veut dire aller au-delà de ces facteurs d’externalité. Les partis d’extrême-droite trouvent souvent tout un bassin d’électeurs de gauche, ne faudrait-il pas alors expliquer que leurs programmes sont souvent aussi anti-capitalistes, interventionnistes et protectionnistes que l’extrême-gauche? Ce n’est pas une critique, je leur demande juste d’assumer que le brun est plus proche du rouge que l’on le laisse croire!

Quand Oskar Lafontaine, de Die Linke, dénonce les « Fremdarbeiter », il dit la même chose que le NPD. Mais non, il ne faut surtout pas dire que Die Linke a du vocabulaire commun avec le NPD, comment peut-on vraiment croire que la gauche puisse emprunter des mots au « Rechtextreme »?

Ces concepts de gauche et de droite sont en plus d’être usés, très mal utilisés. On se rappellera aussi qu’ils ont pour origine quelque chose de très aléatoire, à savoir les supporters et opposants du roi après la Révolution française.

Avec ce qui se passe aux États-Unis, les médias ont tendance à parler plus de libertarianisme. Un courant qui se retrouve, par la force des choses, associé au national-socialisme parce qu’il est censé être « plus à droite que les libéraux et conservateurs ». Voulez-vous bien me dire ce que le Tea Party aurait en commun avec le NSDAP?

Soit dit en passant, regardons ce que dit le très connu Political Compass (Ici le mien) sur le sujet:

Once you accept that left and right are merely measures of economic position, the extreme right refers to extremely liberal economics that may be practised by social authoritarians or social libertarians.

Similarly, the extreme left identifies a strong degree of state economic control, which may also be accompanied by liberal or authoritarian social policies. It’s muddled thinking to simply describe the likes of the British National Party as « extreme right ». The truth is that on issues like health, transport, housing, protectionism and globalisation, their economics are left of Labour, let alone the Conservatives. It’s in areas like police power, military power, school discipline, law and order, race and nationalism that the BNP’s real extremism – as authoritarians – is clear. It’s easy to see how the term national socialism came into being. The uncomfortable reality is that much of their support comes from former Labour voters.

This mirrors France’s National Front. In running some local governments, they reinstated certain welfare measures which their Socialist predecessors had abandoned. Like similar authoritarian parties that have sprung up around Europe, they have come to be seen in some quarters as champions of the underdog, as long as the underdog isn’t Black, Arab, gay or Jewish ! With mainstream Social Democratic parties adopting – reluctantly or enthusiastically – the new economic libertarian orthodoxy (neo-liberalism), much of their old economic baggage has been pinched by National Socialism. Election debates between mainstream parties are increasingly about managerial competence rather than any clash of vision and fundamental difference in economic direction.

Article complet LCS tu verras où ils placent le BNP. Et ici les néo-nazis allemands

Reconnaissance à sens unique

Rue Frontenac s’étonne que Victor-Lévy Beaulieu est demeuré inconnu en France malgré tout son travail (Ici).

Quoi qu’on en pense, tout à son honneur de voir ses livres être connus à l’extérieur de nos frontières. Mais la nouvelle est passé dans le filtre nationaliste: Claudia Lachappelle trouve que c’est un « choix judicieux ».

Peut-être, je ne le sais pas, je n’ai jamais lu ses livres.

Je vois par contre dans cet article une autre expression de notre isolationnisme culturel. On encense ceux qui exportent, on trouve tout ce que l’on fait comme digne d’un Nobel mais, surtout, pas un mot sur le bon qui vient d’ailleurs.

Marc Cassivi a admis que c’est même un problème dans son rôle de critique, le milieu québécois n’appréciant pas d’avoir des torts.

Cela dit, c’est typique du « small-nation syndrome »: quand DR vend une série, ça fait les manchettes culturelles au Danemark.

La différence avec majeure avec le Québec étant cependant qu’ici, on peut presque pas comparer. Même des produits culturels français ne sont pas traités aussi bien que ce qui est fait ici. Quand ils ne sont pas tout bonnement ignorés…

L’obsession française

La semaine dernière, j’étais encore traducteur/accompagnateur pour « un des pays qui est taggé en haut » à la Coupe des Nations de Saguenay. Ma semaine préférée de l’année, le seul moment où j’adore être au Saguenay. Les médias, le public et même l’annonceur de la course n’en avaient que pour la France, malgré leurs résultats bien moyens. À quelque part, c’était pire que l’an dernier où ils avaient au moins de meilleurs performances. Prenez par exemple la journée où l’équipe finit dans les 30 derniers, le Quotidien réussit à les ploguer avec la journaliste qui est allé dans la voiture du coach (soi dit en passant, les 9 membres de la délégation sont tous très gentils – c’est juste l’aura non-fondé qui est fatiguant).

Cet après-midi, France-Uruguay à la SRC… Aucune retenue de la part de l’équipe, c’est la France, la France, allez les Bleus… Même à TVA! Quand je pense aux réserves de la télévision allemande quand il est question du Nationalelf, je trouve cela indécent de dérouler le tapis rouge à une équipe dont les propres fans sont peu convaincus des succès à venir.

Après ça, on ose décrier les fédéralistes québécois comme étant colonisés. Je me demande qui est le colonisé quand je vois tous ces gens crier pour la France comme si on était un DOM-TOM…

Ce qui me rappelle ma réponse à une dame qui se plaignait que je ne supportais pas le Canada à la course de vélo… « Madame, je vais supporter le Canada quand je vais laver leurs bobettes »


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